Laeti, Maude et moi, accompagnées de Nicolas, prenons le train pour Zermatt en fin d'après-midi. Tout est prêt, enfin, après des semaines de préparation. Nous logeons cette année à l'hôtel Couronne, un 3+ très agréable et avons une chambre à côté de celle du team de Nicolas. Vers 22h00, alors que nous lisons tranquillement au lit, je reçois un sms de Nico qui m'apprend que le le départ est repoussé à dimanche matin. Yes, heureuse, ils annoncent un temps magnifique et l'optique de courir sous les étoiles nous motivent fortement.
Vendredi 2 mai et Samedi 3 mai 2014
Nous profitons de ces moments tranquilles à Zermatt pour peaufiner notre tactique de course, pour discuter et échanger de magnifiques moments avec l'équipe de Nicolas. Avec les filles, nous parlons beaucoup de psychologie, ce qui nous a menées sur de belles discussions de Vie. Toute la course a été visualisée, et re-visualisée, et re-re-visualisée à maintes reprises, afin de mettre les paramètres "internes" à la course à 100%. Les paramètres externes, nous ne pouvons pas les maîtriser (tels que le froid, la météo, une blessure ,etc...), mais nous sommes convaincues qu'avec une attitude un maximum positive, nous pouvons les atténuer :-)
Je garde d'excellents souvenirs de ces échanges humains, et nous avons pris ce "report" de course en positif. Nous avons beaucoup rigolé, et ces moments joyeux malgré la tension qui montait sont primordiales. Nicolas y veillait et y a mis beaucoup du sien afin que l'on soit dans les meilleures disposition pour "vivre pleinement l'aventure de la Patrouille des Glaciers".
De mon côté, j'ai appelé mon oncle Michel Pont, entraîneur adjoint de l'équipe suisse de foot, pour qu'il me donne quelques trucs et tuyaux d'un point de vue mental. Et ce fut très bénéfique ! Merci ;-)
On regarde l'émission sur la PDG du jeudi à Couleurs Locales, à l'église, préparation de la corde, Nico-Gg-Juan team au contrôle matériel
Dimanche 4 mai, 1h00 du matin
Le réveil sonne... nous n'avons pas beaucoup dormi... le coeur cognait fortement dans le thorax, l'excitation est à son comble. Déjà, des centaines de lumières doivent éclairer les glaciers. Etonnement, je me sens très bien, je ne ressens plus de pression du tout, tout est prêt, je suis prête, nous sommes prêtes.
Dimanche 4 mai, 3h00 du matin
Nous sommes au départ, émues. La nuit nous attire, la montagne nous attend. 3, 2, 1... go!!! La course est lancée, nous avec, et je passe la ligne de départ avec les larmes aux yeux. Je pense à mes filles qui m'attendent à Verbier. Véritable transhumance alpine qui va nous amener à Verbier à travers la montagne. Nous y serons presque plus vite que par la route :-)
C'est bon, la forme est au rendez-vous. Les jambes répondent bien, la tête est heureuse, je regarde cet univers et je le sens me porter.
Staffel déjà... puis Schönbiel... et là, on rentre dans l'univers glaciaire, les crevasses ne sont pas loin, le froid commence à mordre... au-travers de la cordée nous ne formons qu'un, la cordée est soudée.
Très tôt, l'aube se lève déjà, et commence à illuminer l'horizon. Staffel tout en bas, la Dent d'Hérens, le Cervin et la Dent Blanche nous guettent, découpées dans l'ombre. Les formes se dessinent, les cordées avancent progressivement... silence... splendeur...
Tête Blanche. Vite, on enlève les peaux, ne traînons pas ici, il fait froid, on est haut, Arolla n'est plus très loin. La descente sous la cabane Bertol est bosselée jusqu'à Plan Bertol. Nous restons concentrées, les cailloux ne sont pas très loin. Maude me lance : " Ca fait mal aux cannes, hein? "
6h37', nous passons le check-post à Arolla. Avec près de 20 minutes d'avance sur la deuxième équipe féminine. Nous sommes en forme, ensemble, et d'attaque pour le "mur glacé" qui nous attend, juste là devant.
Le rythme est bon, nous montons l'une à côté de l'autre, je me sens bien, Maude et Laeti aussi. Quand soudain, Laeti commence à sentir des douleurs lancinantes à la hanche... que faire pour l'aider? Nous restons soudées mentalement dans ce moment-clé, nous tentons de la soutenir du mieux possible. Elle va serrer les dents jusqu'à la fin, pour pouvoir offrir à l'équipe la récompense de tout ce travail!
Riedmatten, nous apprenons que l'équipe d'Emilie, Axelle et Jennifer a abandonné. Nous montons par le couloir de la voie rapide. Nous sommes désolée pour toutes ces patrouilles restées bloquées des heures durant "en attente" avant de pouvoir accéder au couloir! Une solution doit absolument être trouvée par respect pour toutes ces patrouilles entraînées restées bloquées des heures durant dans l'attente de pouvoir accéder au couloir!!!
La descente du couloir est toujours aussi épique, nous descendons bien bas cette année dans ces sillons de neige. Laeti se rend compte qu'une de ses chaussures à cassé... elle la répare avec une lanière, quant à moi, ma corde de serrage est sortie, j'enlève le bas de combinaison pour remettre le tout en place.
Attention, il faut rester concentrées, il y a du monde pour accéder à Pas-du-Chat, avant le Plat-des-Dix... où une jolie petite promenade en skating nous attend... ouïe, le changement de mouvement me procure des crampes, vite, une petite fiole de magnésium et c'est parti mon kiki! A la force des bras, à la force du mental, et finalement, il est pas si mal passé que ça ce fameux plat!
Et là, on repeaute, on voit Greg Gachet qui nous dit que le record peut vraiment être possible, on part motivées, soudées, dans cette longue ascension jusqu'au pied du couloir de la Rosablanche. Comme depuis le début de la course, je vois l'équipe de Nico qui n'est pas loin, mais on n'a pas encore été en contact.
De nombreux patrouilleurs connus nous encouragent à leurs côtés. Et je me souviens de l'ascension du couloir de la Rosablanche... nous sommes dans le couloir du milieu, rempli de monde. Et là, les couloirs de gauche et de droite se mobilisent pour demander aux personnes devant nous de nous laisser la trace. Quelle belle communion, quel beau partage. Un grand MERCI à tous ces patrouilleurs nous ayant encouragées!!!
Arrivées au sommet, on bascule, le soleil éclaire la poudre bosselée (!) de Rosablanche, on pousse à la force du mental pour rejoindre Momin... on repeaute, on voit l'équipe de Nico juste devant, on veut le record, Laeti nous encourage, Maude et moi on donne tout, on monte vite. 2 semaines avant, nous étions au même endroit avec Nico, Gg et Jean-Marc, en séance de "seuil"... c'était dur, comme aujourd'hui, mais j'avais tenu le rythme jusqu'en haut. L'entraînement a payé, tant dans les jambes que dans la tête.
Petit portage final, on dépasse Nico, Gg et Jean-Marc, on est boostées à fond, on bascule, on skie à donfe. Des pointes à 100km/h sur nos lattes étroites et sur une piste gelée (les parents ne lisez pas) J'ai les crampes en skating, mais on arrive, Laeti m'encourage, on déchausse... Verbier est là, avec sa foule en folie!
Medran, on court, portées par les applaudissements de la foule, Laeti boîte à cause de sa hanche. Nico, Gg et Jean-Marc nous on rejoint. Nous sommes presque au bout, nos familles et les gens qui nous soutiennent sont tout proche, juste au bout, après le virage. Et là, je crie à Laeti : "Y'a la banderole ARRIVEE"!
Lily me tend la main, mon Papa me donne Mila dans mes bras, et nous franchissons la ligne, heureuses, en se jetant dans les bras! Lily s'accroche aux jambes de Laeti (elle pense que ce sont les miennes hihi), nos proches sont émus aux larmes et nous aussi. Que d'émotions! Le record est battu de près de 15 minutes, le fruit d'un magnifique travail d'équipe!
Nico passe la ligne 2'' avant nous, ce qui est incroyable! Finir ensemble après une course si longue ? Déjà à Arolla il y a deux ans, nous avions franchi la ligne ensemble sans s'être côtoyés pendant la course :-) BRAVO à lui et son équipe!!!
J'adresse un MERCI particulier à mes co-équipières, Maude et Laetitie, avec qui j'ai échangé de si bons moments. Nous avons fait une course d'équipe, et c'est ce qui est le plus beau. J'ai côtoyé deux grandes championnes. En course comme dans la Vie, ce sont deux superbes personnes, avec lesquelles les échanges sont profonds.
MERCI à mon coach-mari-masseur-supporter-et-tout-et-tout Nicolas, qui croit toujours en moi, ainsi qu'en la Vie. Il est mon plus grand soutien moral. C'est un excellent entraîneur auxquel j'apporte toute ma confiance, ainsi q'une personne d'une grande humanité, toujours là dans les moments de doute ou de stress. J'apprends énormément de son lâcher-prise et de sa phrase : "Dans la Vie, tout est une question d'attitude" :-)
Merci à mes sponsors et partenaires qui me font confiance et sans lesquels une telle aventure ne serait plus possible. Et avec lesquels de vrais liens d'amitié se sont tissés au fil des saisons.
Merci à Grégoire, Jean-Marc (le mari de Maude), la Maman de Maude et Charlotte, Denis et Nathalie, Julien et Didier, Catherine, Thibaud et Claire, Nathalie, Chloé et Julien, qui était notre super staff de ravitailleurs! Vous avez été top !
Merci à mes filles qui m'ont .... poussée jusqu'à l'arrivée, mes parents, mes beaux-parents, à nos amis, ainsi qu'à toute l'équipe d'Aprotec, pour leur présence, leur soutien et leur enthousiasme!
Et un GRAND BRAVO à tous les patrouilleurs! Que la montagne est belle!
Vive la Montagne, Vive l'Amitié, Vive la Patrouille des Glaciers!!!
Séverine
Chère Séverine,
RépondreSupprimerWaouaow! C'est époustouflant. J'ai eu les larmes aux yeux en lisant ton récit! Un grand bravo à toi et à ton équipe, au sens large. Et meilleures salutations du Pays de Fribourg :-)
Cathy-la-journaliste
Chère Séverine,
RépondreSupprimerQuel beau record ! Quelle belle aventure ! BRAVO !
Les larmes, je les ai eues également en te voyant passer la ligne d'arrivée avec tes coéquipières et surtout avec tes petites dans les bras. Vous étiez toutes très émouvantes ! Quelle belle leçon d'humilité tu nous donnes !
Vive le sport ! Avec toute mon Amitié Jacqueline Millier de Compesières